Batimat, le grand virage d’un salon historique

Batimat, le grand virage d’un salon historique

Depuis plus de soixante ans, Batimat fait partie de ces rendez-vous dont le nom évoque à lui seul tout un pan de la culture du bâtiment. Pour les industriels, les architectes, les bureaux d’études et les maîtres d’ouvrage, c’est longtemps resté un incontournable : celui où l’on venait présenter une innovation, découvrir les tendances, ou simplement prendre le pouls d’un secteur en perpétuelle évolution. Mais entre 1999 et 2024, le visage de Batimat a profondément changé. En trois décennies, le salon est passé du gigantisme à la maîtrise, de la démonstration de force à la rencontre ciblée, tout en conservant une place unique dans le paysage professionnel.

En 1999, Batimat atteint son apogée avec près de 492 000 visiteurs. Une affluence record qui consacre la notoriété du salon et l’excellence du savoir-faire français en matière de construction. Mais derrière ce succès, le modèle montre déjà ses limites : année après année le visitorat baisse. La crise financière de 2008 fragilise l’investissement industriel, les stratégies de communication évoluent, et la montée en puissance d’internet commence à transformer la manière dont les acteurs du secteur s’informent et se rencontrent. En 2009, la fréquentation tombe à environ 380 000 visiteurs, avant de se stabiliser autour de 350 000 visiteurs entre 2011 et 2013. Le signe d’un essoufflement progressif d’un modèle qui cherche à se réinventer.

De Villepinte à Versailles : une réorganisation nécessaire

C’est dans ce contexte que les organisateurs décident, en 2013, de transférer le salon de la Porte de Versailles à Paris-Nord Villepinte. L’objectif est clair : offrir un site plus vaste, mieux adapté aux grands stands et aux flux internationaux. Le pari logistique est réussi, mais le changement d’environnement crée une rupture. Le salon gagne en professionnalisme, mais perd un peu de cette convivialité et de cette centralité parisienne qui faisaient partie de son ADN.

Ce déménagement s’accompagne d’une réorganisation en profondeur. La durée de l’événement passe de six à quatre jours, la sélection des exposants se fait plus exigeante, et la dimension de contenu prend une place croissante. Le salon quitte peu à peu son statut de “foire du bâtiment” pour devenir une plateforme d’échanges, structurée autour du Mondial du Bâtiment, qui fédère désormais Batimat, Interclima et Idéobain. Ensemble, ces trois salons couvrent l’ensemble de la chaîne de valeur, de la structure à l’équipement, et traduisent la volonté d’offrir une vision intégrée des mutations du secteur.

Un marché en recomposition : entre concurrence et crise sanitaire

Mais Batimat n’évolue pas dans un vide. La concurrence se renforce à tous les niveaux. Sur la scène internationale, des événements comme Bauma à Munich, The Big 5 à Dubaï ou Bauma China captent l’attention des fabricants à vocation export. En France, la pression s’exerce aussi. Des rendez-vous régionaux comme Artibat à Rennes ou Nordbat à Lille séduisent par leur format plus ciblé et leurs coûts maîtrisés. Dans un registre différent, Architect@Work, lancé en France en 2011, s’impose progressivement auprès des architectes et prescripteurs. En misant sur la qualité des échanges et la sélection rigoureuse des innovations présentées, il attire un public que Batimat rassemblait autrefois en masse. Les grands négoces, à l’image de Rexel, Saint-Gobain ou Point P, multiplient également les journées techniques et les roadshows, au plus près de leurs clients. Résultat : les budgets des industriels se fragmentent, et les salons généralistes doivent désormais prouver qu’ils offrent encore une véritable valeur ajoutée.

À cette recomposition du marché s’ajoute le choc brutal de la crise sanitaire. Les grands salons sont annulés, plongeant tout le secteur de l’événementiel dans une période d’incertitude. Les chiffres publiés par la CCI Paris–Île-de-France en 2023 confirment un recul de plus de 20 % du chiffre d’affaires lié aux salons par rapport à 2018. Le retour de Batimat en 2022 prend alors valeur de test. Pour cette édition de renaissance, le salon retrouve sa localisation historique à la Porte de Versailles, symbole d’un retour à l’essentiel et au contact direct. Le pari est audacieux : quatre ans après la dernière édition, le public répond présent.

Certes, la fréquentation chute à environ 135 000 participants (contre 284 000 en 2019), loin des records passés, mais la qualité du visitorat surprend. Les professionnels venus sur place sont pour la plupart des décideurs, architectes, maîtres d’œuvre, entreprises ou institutionnels. Le salon s’impose de nouveau comme un lieu de rencontres utiles, où l’on vient chercher des solutions concrètes et des réponses aux grands enjeux de la transition écologique et énergétique.

Un salon en phase avec la transformation du secteur

La mutation s’accélère encore avec l’édition 2024, marquée par un retour affirmé à la dynamique d’innovation. En quatre jours, près de 1 500 exposants se succèdent, dont plus d’un tiers de nouveaux participants. Les thématiques phares confirment le virage opéré par l’ensemble de la filière : décarbonation, industrialisation hors-site, digitalisation des procédés et rénovation énergétique. Le salon se transforme en espace d’expérimentation. Le Village Start-Up accueille les jeunes pousses du bâtiment connecté, les “RenoDays by Batimat” rassemblent les acteurs de la rénovation autour de débats techniques, tandis que la zone “Hors-Site Area” met en lumière les nouvelles méthodes de préfabrication.

Cette évolution témoigne d’une volonté claire : replacer Batimat au cœur de la transformation du secteur, non plus seulement comme vitrine commerciale, mais comme carrefour européen de l’innovation et de la transition du BTP.

À l’horizon 2026, cette stratégie s’affirme encore. L’événement, prévu du 28 septembre au 1er octobre à la Porte de Versailles, ambitionne d’accueillir 1 700 exposants et plus de 300 000 visiteurs. Le slogan choisi, “Let’s Change Our Perspective”, résume bien l’état d’esprit : repenser le format, ouvrir de nouvelles perspectives internationales et renforcer la complémentarité entre présentiel et digital. Pavillons pays, outils numériques de mise en relation, contenus diffusés en replay… Le salon assume pleinement son virage “phygital”, convaincu que la rencontre physique, enrichie par le numérique, demeure un levier essentiel de développement pour la filière.

Une vitrine qui reste un baromètre du secteur

Batimat reste, à bien des égards, un baromètre de l’état du bâtiment. Sa trajectoire depuis vingt ans reflète la mutation d’un secteur qui se professionnalise, se décentralise et s’internationalise tout à la fois. Le succès ne se mesure plus au nombre de badges scannés, mais à la qualité des échanges noués. En 2026, le salon n’aura plus besoin de battre des records pour exister : il devra simplement continuer à prouver qu’il sait connecter les bons acteurs autour des bons sujets. Une ambition exigeante, mais à la hauteur de son histoire.

 

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